Le système de censure chinois s'organise en trois cercles qui tentent de réduire le plus possible l'espace de liberté de millions d'internautes. Pékin procède aussi au «hacking patriotique» et, selon les experts, la Chine serait à l'origine de près d'un tiers des «programmes malveillants» de la planète.

Àl'évidence, les cercles les plus conservateurs du pouvoir pékinois rêveraient de transformer l'Internet chinois en gigantesque Intranet pour 1,3 milliard d'habitants, un réseau interne ne puisant aux sources du Web mondial que le juste nécessaire. En tout cas, étanche à ses contenus nuisibles moralement… et politiquement.

À l'automne dernier, le puissant ministre de la Sécurité publique, Meng Jianzhu, a clairement affirmé que le développement rapide d'Internet en Chine posait des «défis sans précédent» en matière «de contrôle social et de maintien de la stabilité». Et évoqué la nécessité de «mettre sur pied un vaste système de sécurité, qui couvre l'Internet et le monde réel». Après avoir vu dans Internet une utile soupape pour la marmite sociale, les autorités ont fini par s'inquiéter de ce vecteur de propagation horizontale de conflits locaux à travers tout le pays. Une expression s'est d'ailleurs forgée, les «incidents de masse sur Internet».

Le système de censure chinoise s'organise en trois cercles. La police de l'Internet, qui serait forte de 40 000 personnes. Puis tous les opérateurs privés des sites et forums, avec une forme de censure habilement sous-traitée, dont les soldats efficaces ne sont pas comptabilisés. Enfin, et ce n'est pas le moindre des leviers, l'autocensure des internautes, des modérateurs ou des hébergeurs, savamment entretenue.

Au niveau national, la responsabilité de la censure incombe comme souvent à deux structures, l'une dépendant du Parti et l'autre du gouvernement. Le département de la propagande du Parti d'un côté, et le bureau d'information du Conseil d'État de l'autre. À l'occasion de l'affaire Google, le patron de cette deuxième entité, Wang Chen, vient de réaffirmer la nécessité de contrôler Internet pour «guider l'opinion publique». Ensuite, cette double chaîne se décline à tous les échelons régionaux et administratifs. Avec une cascade de niveaux de responsabilité qui secrète la confusion. «Il y a tellement d'acteurs pour la censure que les critères ne peuvent être unifiés, raconte Hu Xingdou, professeur à l'Institut de technologie de Pékin, ce qui est illégal aux yeux de certains est autorisé par d'autres.»

Cet économiste réputé, écouté par le pouvoir qu'il ne ménage pourtant pas, a eu la malheureuse surprise de voir son blog bloqué au printemps dernier. Et curieusement, alors qu'il est pékinois, par le bureau de surveillance de la police de Suzhou, dans la province du Jiangsu. L'homme ne s'est pas démonté et a lancé ses avocats à l'attaque. En s'en prenant habilement à son hébergeur pour violation de contrat plutôt qu'à la censure étatique. Et il a gagné. «C'était la première victoire de ce genre, estime-t-il, mais je pense que cela ne serait plus possible aujourd'hui. En quelques mois, la liberté sur Internet a considérablement reculé.»

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