Nicolas Sarkozy reçoit lundi après-midi à l'Élysée les représentants de la chaîne alimentaire. Au programme: un accord de modération des marges en cas de crise sur les fruits et légumes.

Nicolas Sarkozy veut rester en première ligne sur le front agricole. Il reçoit lundi après-midi à l'Élysée les représentants de la chaîne alimentaire: agriculteurs, industriels de l'agroalimentaire ainsi que distributeurs. Avec un objectif clairement affiché à la veille de la lecture au Sénat du projet de loi de modernisation agricole (LMA): rééquilibrer les relations commerciales au profit des producteurs.

Ainsi, pour éviter que ne se reproduise la crise de l'été dernier sur le marché des fruits et légumes qui s'est traduite pour les producteurs par une chute de 30% des prix des pêches et même de 50% de ceux de la pomme, le chef de l'État va présenter un mécanisme de modération des marges pratiquées par la grande distribution. «À partir du moment où un fruit ou un légume sera en crise, c'est-à-dire que son prix journalier chutera de 10 à 20%, le distributeur devra contenir son prix d'achat et baisser son prix de vente au consommateur», explique un proche du dossier.

Objectif final: éviter la vente à perte pour les producteurs et écouler un maximum de produits pour relancer les prix. «Une véritable usine à gaz», estime déjà Michel-Édouard Leclerc, présent lundi après-midi à l'Élysée tout comme son concurrent, le patron de Carrefour, Lars Olofsson. Guère plus enthousiaste par ce mécanisme technocratique, ce dernier avance deux propositions concrètes: «L'instauration d'un prix d'achat garanti» tenant compte des coûts de production agricole lors des crises graves ainsi que «la création d'un fonds de conversion à l'agriculture biologique qui permettrait aux agriculteurs français, quasiment absents du marché bio, de faciliter le financement de leur transformation».

«Une taxe additionnelle»

Les distributeurs ont-ils vraiment le choix de refuser ce mécanisme? «Celui qui ne voudrait pas rentrer dans ce dispositif sera contraint à payer une taxe additionnelle sur la surface commerciale très dissuasive», affirme-t-on de sources ministérielles. Un point que la Fédération du commerce et de la distribution (FCD) rejette catégoriquement. Son président, Jérôme Bédier demande que «soit examinée l'intégralité de la chaîne des coûts, y compris ceux des industriels, qui sont les premiers débouchés des producteurs».

Mais les industriels représentés par l'Association nationale des industries alimentaires (Ania), ne l'entendent pas de cette oreille. Ils se disent «pas concernés » par les problèmes soulevés par l'accord. Enfin, tout en amont, les producteurs de fruits et légumes restent dubitatifs. «En économie ouverte, l'efficacité de ce genre de mécanisme est très limitée, explique François Laffitte, président de la Fédération de producteurs de fruits et légumes, nous avons déjà tout tenté sans jamais trouver de solutions efficaces depuis l'abandon des mesures de régulation qui permettait de retirer du marché les quantités excessives de fruits et légumes frais. Par ailleurs, cet accord ne prévoit rien sur la compétitivité en termes de coûts et réglementation phytosanitaires.» Dans ces conditions, on peut se demander si cet accord sera suffisant pour calmer les esprits trois semaines après le défilé parisien avec ses milliers d'agriculteurs dans la capitale.