Je suis Maire de Taipei, et je parle le francais.

J'ai commencé mes études de francais en seconde année de faculté. J'étais alors dans le département de droit et comme langue seconde,optionnelle, on pouvait choisir l'allemand, le français ou le japonais. Moi, j'ai choisi le francais parce que je comptais me spécialiser en droit international. En ce temps-là, j'admirais énormément Monsieur KU Wei-chün, éminent diplomate. Il a été représentant de notre pays à la Conférence de la Paix à Paris , ambassadeur aux U.S.A et Juge à la Cour Internationale de la Haye. En 1919, alors qu'il participait à la Conférence de la Paix à Paris, il a déclaré que les Chinois ne pouvaient pas abandonner Shan-Tung comme les Chrétiens ne pouvaient pas abandonner Jérusalem. Il a réussi à convaincre les représentants des autres pays, a sauvé notre territoire et recueilli notre estime. Ainsi, j'ai choisi le français afin de suivre un jour l'exemple de Monsieur KU, dans sa façon de traiter les affaires internationales. Dans le département de droit de Tai-Da, la plupart des étudiants qui choisissent une langue seconde ne l'apprennent que deux années; pour ma part, j'ai étudié le francais trois ans. Quand j'étais en troisième année de francais , j'étais étudiant en quatrième année. Malgré le poids des études en quatrième année, j'ai quand même beaucoup travaillé mon français; c'était peut-être pour saisir le charme de cette langue avant de quitter l'université. Je me souviens d'avoir rédigé un article sur < La Peine de mort >. Notre professeur de francais, un père francais --- Fan Bing-Yi --- a été émerveillé; il l'a imprimé et l'a distribué à mes camarades en l'expliquant dans la classe. A vrai dire, j'étais bien gêné. Chose curieuse, c'était même une des questions de l'examen de mi-semestre !


A mon avis, la langue est un excellent outil de communication. Elle est importante car elle nous permet de toucher une autre culture. Lorsque j'ai rédigé ma thèse de doctorat, j'ai cité peu de références en francais, une fois peut-être; c'était un article d'un professeur coréen, Choon-ho Park, actuellement juge à la Cour de Droit Maritime International de Hambourg. Bref, je pense que pouvoir apprendre la langue de Voltaire, Rousseau, Zola et Camus cela a bien du sens. je sais tout de même écrire en francais les chiffres de un à cent. C'est un bon exercice mathématique : 70, c'est soixante plus dix, quant à 80, c'est quatre fois vingt; ainsi, 1999, c'est l'an mille neuf cent quatre-vingt dix-neuf ! Comme la construction est différente des autres langues, il faut réviser de temps à autre pour ne pas l'oublier.

En fait, je n'ai pas beaucoup d'occasions de parler français en public; une fois j'ai récité un poème francais au temple de Confucius avec Mme Cheng Shou-Min, ancienne ministre de la Culture. Comme ce temple se trouve près de la piste de l'aéroport, on entend souvent le bruit des avions. Cela ne l'a pas empêchée de lire aisément le texte d'une voix mélodieuse. C'était une expérience inoubliable.

Après avoir été élu maire, mon premier discours en francais fut pour l'inauguration du " Séminaire des Plans d'urbanisme Taipei --- Paris ". J'ai préparé d'avance un discours et l'ai appris par coeur. J'étais très nerveux ce jour-là de sorte que j'ai eu du mal à bien le prononcer. Mais après mon discours, on m'a dit que les architectes français avaient été très supris qu'un maire, en Asie, sache si bien parler le francais. En réalité, ils ne savaient pas que pendant ces cinq minutes-là, j'étais trempé de sueur.

La deuxième fois, ce fut à l'occasion du cocktail du Festival des films francais; j'ai mentionné mes impressions sur << Belle de jour >> << Le dernier métro >> etc... c'était une expérience spéciale, très francaise d'ailleurs, et je me suis même servi d'une citation d'un film --- " T'as de beaux yeux, tu sais. "