Pourquoi les profs font grève

Des enseignants défilent cet après-midi dans les rues de Nantes, comme un peu partout en France, notamment pour protester contre les suppressions de postes dans l'Education nationale.

 

DU PUBLIC au privé, tous syndicats confondus, ils ont décidé de faire de ce jour de grève, première grosse mobilisation dans l'Education depuis la rentrée et premier test d'un service minimum que la loi impose désormais aux communes l'occasion de crier fort leur « ras-le-bol ». Mais sous les banderoles de la manifestation parisienne cet après-midi, à 14 h 30, près du Luxembourg, il n'y aura pas un mot d'ordre unique.

« On n'en est plus seulement aux réclamations salariales, justifie un prof de collège de la capitale, il y a tellement de raisons aujourd'hui ! »

* Les suppressions de postes. Les 11 200 prévues pour cette rentrée ont déjà jeté enseignants et lycéens dans la rue l'an dernier. « Le ministre a beau répéter qu'il n'y a jamais 30 élèves par classe en seconde, c'est pourtant le cas, même dans mon lycée privé », maugrée Pierre Alain, prof de maths en Seine-et-Marne. L'annonce de 13 500 « non-remplacements » supplémentaires pour l'année prochaine n'a pas arrangé le moral du corps enseignant. En primaire, les 11 000 maîtres spécialisés (Rased), censés accompagner ponctuellement les élèves en grande difficulté scolaire et psychologique, vont ainsi perdre 3 000 des leurs l'an prochain : le ministre veut les sédentariser et les remettre au tableau devant des classes ordinaires.

* L'école primaire. Depuis l'an dernier, les instituteurs ont successivement dû digérer une réforme des programmes, la suppression de deux heures de cours le samedi, leur transformation en heures de soutien les quatre jours de classe restant. Plus les stages pendant les vacances, auxquels les volontaires se sont tout de même pliés, malgré les mots d'ordre syndicaux. Cette rentrée, ils se sentent attaqués avec la reconversion des 3 000 Rased, et la confirmation que la maternelle demain n'accueillera plus les moins de 3 ans : le gouvernement planche sur l'idée de jardins d'éveil, dans l'idéal « adossés » aux écoles mais qui ne dépendraient plus de l'Education nationale.

* La réforme du lycée. Elle se prépare à une « nouvelle seconde » dès la rentrée de 2009. Le ministre a dévoilé le cadre : un tronc commun de matières fondamentales, maths, français, histoire et langues, et des modules semestriels. « Alors que des commissions restreintes sont censées toiletter les programmes à toute allure pour la fin décembre, c'est le grand flou ! » observe un prof de lycée. « Comment vont se dessiner les emplois du temps ? Comment les élèves de troisième et leurs parents vont-ils choisir ? Avec quelle réelle liberté ? »

* Les matières malmenées. Les 5 000 professeurs de sciences économiques de lycée, qui sont allés jusqu'à s'offrir des encarts publicitaires dans les journaux, sont furieux : dans la future seconde, leur matière devient un module de découverte semestriel. « Alors que l'on n'a jamais autant parlé d'économie avec la crise, que c'est une filière qui séduit 43 % des élèves, et en mène un sur deux avec succès vers les études supérieures, instituts d'études politiques, classes prépa, BTS ! » déplore Rémi, prof à Morangis (Essonne).

 

Les Rased sont des maîtres spécialisés qui accompagnent ponctuellement les élèves de primaire. Trois mille de leurs postes vont être supprimés à la rentrée.